En ce 21 mars, journée mondiale de la lutte contre le racisme, il est primordial d’être attentif lorsque nous y sommes confrontés à des faits pouvant en présumer. Dans chaque pays des lois ont été votées afin de sanctionner le racisme comme il se doit. Malgré tout, il existe encore trop de comportements racistes dans le monde professionnel mais aussi dans l’enseignement.
Les textes légaux contre le racisme en Belgique
Divers textes légaux encadrent les actes de discrimination basés sur une prétendue race en Belgique :
- Loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie
- La loi tendant à lutter contre certaines formes de discrimination du 10 MAI 2007 et mise à jour le 21-05-2019
- Décret relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination du 12 décembre 2008
Il est important de souligner qu’en matière de discrimination sur base d’un critère protégé que sont : la prétendue race, le handicap, le genre, les préférences sexuelles, … la charge de la preuve est inversée. Cela signifie que lorsque qu’un faisceau de présomptions est constitué, les auteurs des faits doivent prouver qu’ils n’ont pas agit avec des motifs discriminatoires.
Un travailleur qui se fait harceler dans un contexte de discrimination peut prétendre à une indemnisation doublée si il porte plainte pour harcèlement moral devant le tribunal du travail.
Les textes légaux contre le racisme en France
En France, les actes de discrimination basés sur une prétendue race sont encadrés par plusieurs textes légaux, notamment :
- La loi n° 2001-1066 du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations : cette loi introduit dans le Code pénal un article 225-1 qui prévoit que « constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée ». Cette loi a également créé la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité (HALDE), devenue le Défenseur des Droits en 2011, qui est chargée de lutter contre toutes les formes de discrimination et de promouvoir l’égalité.
- La loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Égalité : cette loi renforce les pouvoirs de la HALDE (devenue Défenseur des Droits) en matière de lutte contre les discriminations et prévoit notamment la possibilité de saisir le juge des référés en cas de discrimination manifeste.
- La loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté : cette loi renforce les sanctions pénales contre les auteurs d’actes de discrimination, notamment en introduisant une peine complémentaire d’inéligibilité et en permettant aux victimes d’obtenir réparation du préjudice subi.
- Le Code pénal : l’article 225-2 du Code pénal prévoit que « la discrimination définie à l’article 225-1, commise à l’égard d’une personne physique ou morale, est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsque la discrimination consiste en un refus d’accès à un bien ou à un service ou en soumettant une personne à des conditions de fourniture de biens ou de services moins favorables qu’une autre personne ». D’autres dispositions du Code pénal prévoient des sanctions pour les auteurs d’incitation à la discrimination ou à la haine raciale.
- La jurisprudence : les tribunaux sont également amenés à se prononcer sur des affaires de discrimination raciale et contribuent ainsi à préciser l’interprétation des textes légaux en la matière.
Ces différents textes et instances visent à lutter contre toutes les formes de discrimination, y compris celles basées sur une prétendue race.
En France, toute personne qui s’estime victime de discrimination dans le cadre de son travail :
- discrimination à l’embauche
- refus de promotion
- harcèlement moral
- etc.
a la possibilité de se faire dédommager en entamant une procédure au conseil des Prud’hommes.
Quelques faits présumant de discrimination basée sur une prétendue race
Cela se passe dans un contexte scolaire et pour des travaux de fin d’études ou mémoires à présenter devant un jury.
Situation élève N°1
Lors de la présentation de son travail, en seconde session de l’année 2020-2021, un élève obtient la note très basse de 2/40 pour la présentation orale. La motivation du jury pour la partie orale n’est pas motivée sur la présentation en elle-même et le fond de celle-ci mais uniquement de la façon suivante :
- Mauvaise gestion du stress
- Voix inaudible
Nous sommes en plein dans les mesures Corona et la présentation s’est faite en présentiel avec un masque !
L’élève après sa présentation écrira à un enseignant n’ayant pas participé à sa cotation :
- « J’avais l’impression d’avoir été une « merde » devant eux»
- « Lorsque l’on arrive devant eux ce sont des injures sous forme de politesse»
- « rajoutons à cela pour tout dire qu’on m’a carrément qualifié de d’une personne qui ne sache pas parler.. tu n’articules pas»
- « jamais de la vie, on ne m’a autant humilier de partout sans que je puisse me défendre»
Situation élève N°2
Dans les règles de présentation des travaux, il est prévu qu’en cas d’un nombre de fautes dépassant les 25, l’élève serait prévenu une semaine avant la date de présentation qu’il ne pourrait pas présenter et se verrait attribuer une note forfaite de 1/20 pour l’ensemble du travail.
La jury laisse une élève présenter son travail. A la grande surprise de l’élève, elle apprend le jour de sa présentations que le jury ne la délibérera pour les motivations suivantes :
« Plus de 20 fautes d’orthographe dans le travail écrit : non délibérable »
Par rapport aux règles définies, on remarque donc que le nombre de fautes sur lequel se base la présidente du jury pour prendre cette décision est passé de 25 à 20 fautes. L’élève n’a pas été prévenue non plus anticipativement comme elle aurait du l’être.
Un des principes de base de la démocratie est l’égalité devant la loi ou devant la règle. Un jury ayant à sa tête la même présidente de jury a laissé présenté un autre élève et l’a délibéré alors que le nombre de fautes de son travail dépasse les …. 100 !
Cette élève fera un recours qui n’aboutira pas bien que les erreurs par rapport aux règles de départ semblent difficilement discutables.
Situation élève N°3
Le troisième élève a été en échec modéré sur son travail. Depuis des années dans cet établissement scolaire, tous les élèves avec un seul échec de nature limitée ont vu leur réussite être validée. En première session, cela a encore été le cas.
Cela n’a toutefois pas été le cas pour cet élève.
Caractéristiques communes à ces élèves
En cette journée spéciale de lutte contre le racisme, vous aurez compris que le point commun entre ces 3 élèves est la couleur de peau. Ils sont tout trois originaires d’Afrique subsaharienne ! L’autre élève qui a été délibéré avec plus de 100 fautes n’a pas la même couleur de peau.
Une étude de la fondation Roi Baudouin, que vous pouvez retrouver en fin d’article, est assez inquiétante et montre l’ampleur des difficultés rencontrées par des citoyens Belgo-Congolais, Belgo-Rwandais et Belgo-Burundais dans notre pays.
Cette étude a mis en évidence que les premières expériences de racisme se passent entre les murs des écoles. C’est à lire à partir de la page 124.
Il y est question d’un racisme quotidien mais aussi institutionnel dans les domaines essentiels que sont l’emploi, le logement ou, ce qui est l’objet de cette question, l’enseignement.
A la question suivante : « Pensez-vous qu’en Belgique certaines personnes subissent des traitements inégalitaires/des discriminations ou des insultes à cause de leur couleur de peau ? »
- 92 % des personnes interrogées ont répondu OUI et quand il leur était demandé s’ils en avaient été personnellement victime,
- c’est plus de trois quart de l’échantillon, 77%, qui a répondu par l’affirmative.
C’est donc sans surprise que l’enquête nous apprend que pour les citoyens afro-descendants, l’égalité des chances n’est qu’un leurre. Ils sont 40% à penser qu’ils ne bénéficient pas des même chances que les autochtones en ce qui concerne les chances de réussite scolaire.
La majorité des jeunes qui ont été interrogés par cette étude constate que les discriminations et le racisme ne sont pas nécessairement sanctionnés, ce qui est déjà grave. Mais que plus grave encore, s’en plaindre dans l’espace public peut avoir l’effet escompté inverse, à savoir la sanction du plaignant tant dans l’espace public qu’au sein même des institutions publiques.
Les représailles lorsque la discrimination basée sur une prétendue race est dénoncée
En Belgique, Unia est le centre inter-fédéral de lutte pour l’égalité des chances. Quand un citoyen est victime ou témoin de faits pouvant constituer de la discrimination, c’est un devoir de le dénoncer. Les fonctionnaires ont même l’obligation légale de le faire !
Un enseignant ayant témoigné des faits énoncé ci-dessus a reçu ce courrier de sa hiérarchie :
« Je regrette par ailleurs d’avoir à vous rappeler le devoir de réserve qu’il convient de respecter par rapport à l’extérieur (Unia en l’occurrence). »
Conclusion
Il faut que chacun fasse obstacle au racisme et aux faits pouvant avoir une prétendue race comme motivation. Fermer les yeux voire faire pression sur les personnes victimes ou témoins est inacceptable et s’agissant de pouvoirs publics, cela l’est d’autant plus.
En cette journée mondiale de lutte contre le racisme, prenons comme résolution d’être attentifs à ce phénomène !